édito 2o19
Lâaltruisme est humain . . lâhomme non plus
Lâinsurrection des Gilets Jaunes rĂ©vĂšle moins la colĂšre des perdants de lâĂ©conomie consumĂ©riste que le supplice de leur sevrage. Comme beaucoup dâautres, beaucoup plus nombreux mais plus invisibles et plus rĂ©signĂ©s encore, ils subissent les contractions, les prĂ©carisations, les manques et bientĂŽt lâĂ©limination. Mais, Ă la diffĂ©rence de ce peuple fataliste, ceux-lĂ ne veulent pas se rĂ©signer Ă survivre Ă l’Ă©cart, en silence, au compte-gouttes. Ce sont les petites classes moyennes « exclus de lâintĂ©rieur », exclus au sens large, territorial, Ă©conomique, mĂ©diatique, culturel, qui voient leurs dĂ©penses contraintes croĂźtre quand leur reste-Ă -vivre fond. Ils voient les possibilitĂ©s dâexister et de sâĂ©manciper quâon leur promettait naguĂšre ĂȘtre confisquĂ©es ou interdites. Cette humiliation de classe, cet affront Ă leur dignitĂ©, transforment leurs hontes dispersĂ©es en une mĂȘme colĂšre rassemblĂ©e.
Le droit du travail ne les protĂšge plus, au contraire, lâemploi et la libertĂ© dâentreprendre se prĂ©carisent, les salaires se compriment, le goĂ»t du « bon boulot » est sabotĂ© par les impĂ©ratifs comptables, le chĂŽmage effectif sâaccroĂźt, les services publics quâils paient sâĂ©tiolent et sont phagocytĂ©s par des prĂ©dateurs privĂ©s, lâĂ©tat social solidaire auquel ils cotisent se dĂ©lite et se privatise lui aussi, et « en mĂȘme temps » ils nâentendent que trop la petite bourgeoisie rĂ©actionnaire et donneuse de leçons, calquĂ©e et flattĂ©e par la caisse de rĂ©sonance des mĂ©dias dĂ©fĂ©rents, les culpabiliser dâĂȘtre des riens, des assistĂ©s, de ne pas ĂȘtre agiles, de ne pas ĂȘtre performants, les tourner en ridicule de ne pas ĂȘtre bien Ă©levĂ©s, de ne pas ĂȘtre cultivĂ©s, de ne pas ĂȘtre toilettĂ©s rĂ©curĂ©s, de ne pas savoir penser parfumĂ© et parler manucurĂ©, etc.
Les Gilets Jaunes, et leurs soutiens, sont assez lucides pour dĂ©masquer les escamoteurs qui tentent de les duper. Le tour le plus grossier (et ce nâest quâun exemple) consiste à « leur rendre ce qui est dĂ©jĂ Ă eux ». Leur rendre leurs cotisations sociales, pour leur « donner » un pouvoir dâachat « apparent » en Ă©change de lâĂ©rosion lente et cachĂ©e de leurs assurances solidaires santĂ©, chĂŽmage et vieillesse. Ou encore « leur rendre la taxe dâhabitation » pour mieux affaiblir les engagements communaux de proximitĂ©, au profit des Ă©quilibres budgĂ©taires globaux et iniques dictĂ©s par la finance internationale. Avec ses tours de passe-passe infĂąmes le prince prestidigitateur, jeunet et narcissique, les dĂ©pouille sans vergogne tout en les humiliant de tout son mĂ©pris. Comment ne les mettrait-il pas en rage ?
La prochaine entourloupe est dĂ©jĂ prĂȘte. Offrir un Grand Gala dĂ©mocratique pour mieux subtiliser ce qui nâest dĂ©jĂ plus de la dĂ©mocratie. Je vous ai compris, dira-t-il gaullien, et vous octroie votre RIC par la grĂące de ma rĂ©vision constitutionnelle. Alors il assignera au RIC des conditions dâapplications castratrices et des objectifs frivoles, tout en sâassurant que sa rĂ©vision Ă lui soit plus monarchique encore et plus anti-parlementaire que jamais. Il achĂšvera la division des Gilets Jaunes – division entreprise depuis le dĂ©but – entre ceux qui veulent bien discuter Ă vide et ceux qui demeureront plus enragĂ©s encore, et quâil dĂ©clarera dĂ©linquants dĂšs que lâun dâentre-eux pĂštera les plombs.
En quelques dĂ©cennies, le libĂ©ralisme individualiste, oublieux dâĂ©quitĂ© et de fraternitĂ©, sâest fondu dans le capitalisme. Il sâest mutĂ© en nĂ©olibĂ©ralisme, ultralibĂ©ralisme, ordolibĂ©ralisme, etc. Il n’a plus rien de l’humanisme et des droits fondamentaux d’origine. Le simple « droit de propriĂ©tĂ© », « Usus, Fructus, Abusus », est devenu le « droit de la propriĂ©tĂ© lucrative » avec son investissement du Fructus devenu essentiellement spĂ©culatif et ses modalitĂ©s rĂ©currentes dâAbusus devenues la longue traĂźne nausĂ©abonde des externalitĂ©s qui nuisent Ă la gouvernance partagĂ©e des biens communs et quâon ne veut surtout pas intĂ©grer dans les comptes dâexploitation.
Ce nĂ©o-ultra-ordo-libĂ©ralisme a poussĂ© lâĂ©conomie dans ses extrĂ©mitĂ©s inĂ©galitaires et dĂ©lĂ©tĂšres, jusquâĂ exploser la sociĂ©tĂ© en strates hiĂ©rarchiques de plus en plus Ă©tanches et rivales, Ă des degrĂ©s tels que la disjonction de ces strates Ă©chappe mĂȘme Ă lâentendement des populations respectives qui y sont enfermĂ©es. Ce projet nĂ©olibĂ©rale autoritaire dâabord, totalitaire bientĂŽt, a-t-il une chance dâaboutir ? Peut-on gouverner une nation stable et juste comme on manage une start-up ? Evidemment non, mais les apprentis qui ont pris l’ElysĂ©e aprĂšs avoir investi Bercy, enfermĂ©s dans leurs dogmes technocratiques et managĂ©riaux, minablement outillĂ©s de calculettes et de tableurs, sont malheureusement convaincus du contraire.
Les Gilets Jaunes ne supportent plus dâĂȘtre les « sherpas » qu’on maltraite au profit de la caste des « premiers de cordĂ©e » qu’on abreuve dans lâordre Ă©conomique rivalitaire et brutal des affaires et des rentes. Un beau jour, pour une raison aussi fortuite qu’emblĂ©matique, leurs milliers de hontes isolĂ©es se coagulent en une mĂȘme colĂšre partagĂ©e, leurs mobilisations locales dĂ©fensives s’allient dans une mĂȘme lutte globale offensive. Dans leur sillage sympathisent Ă lâunisson des groupes sociaux plus misĂ©rables mais jusque lĂ reclus et assommĂ©s, ainsi que des groupes sociaux plus confortables mais jusque lĂ indolents et lĂ©thargiques. La multitude qui se mobilise alors autour des mĂȘmes « affects communs » se fait peuple et s’insurge.
Ce ne sont pas les bons Ă©lĂšves des belles Ă©coles de management et d’administration qui sauront gouverner dans cette tempĂȘte avec leurs vieilles boussoles technocratiques et autres rĂšgles comptables du siĂšcle dernier. Ils sont incultes et obtus en matiĂšres de physique, de systĂ©mique, dâanthropologie, de sociologie, et donc dâĂ©cologie profonde. Pire, ils ne savent pas quâils ne savent pas. Les Ă©duquĂ©s supĂ©rieurs souffrent souvent d’un biais cognitif endĂ©mique, ils se croient vraiment supĂ©rieurs et sont donc capables d’entĂȘtements autoritaires funestes. Le novice du quinquennat-lĂ , sorti tout chaud de ce moule-lĂ , a Ă©tĂ© infiltrĂ© Ă Bercy puis Ă lâElysĂ©e par ces parrains-lĂ , pour consacrer ces dogmes-lĂ . Chaque matin, devant son miroir magique, il chante «There Is No Alternative» avec tatie Margaret et il le croĂźt vraiment. NĂ©ophyte, hier encore, il nâa pas su choisir entre administration et théùtre, alors il s’exerce aux deux en-mĂȘme-temps, pistonnĂ© prĂ©sident, applaudi illusionniste. PistonnĂ© comment ? Applaudi par qui ?

usus, fructus, abusus . . abusus . . abusus . . abusus . . (jef safi/flickr) (1) (2)
Ce sont les trois Ă©lĂ©ments constitutifs du « droit de propriĂ©té ». L’Usus est le droit d’usage d’un bien. Le Fructus, le droit d’en percevoir les fruits quelles que soient les modalitĂ©s de son exploitation. L’Abusus, le droit d’en disposer quelle que soit la maniĂšre : troquer, dĂ©naturer, escamoter, dĂ©truire, recycler, blanchir, disperser, abandonner, jeter, etc. Ces effets collatĂ©raux, dĂ©daignĂ©s des comptes, se nomment aussi « externalitĂ©s ».
Alors quand la propriĂ©tĂ© se fait de plus en plus « lucrative », et que le Fructus se fait de plus en plus juteux, il n’est pas surprenant de voir l’Abusus impunĂ©ment rĂ©itĂ©rĂ© se faire de plus en plus . . honteux, odieux, frauduleux, mafieux. La propriĂ©tĂ© « lucrative », un temps bĂ©nĂ©fique en apparence, devient trĂšs vite abusive, injuste et prĂ©datrice, inĂ©galitaire et dĂ©lĂ©tĂšre, aussi jouissive pour ceux qui s’en rĂ©galent qu’insupportable Ă ceux qui s’Ă©puisent, contraints et forcĂ©s, pour produire un Fructus qu’ils ne partagent pas, et qui souffrent de surcroĂźt des mille consĂ©quences de l’Abusus dont ils doivent supporter et rĂ©parer les monstrueuses externalitĂ©s nĂ©gatives. Par ses abus, la « propriĂ©tĂ© lucrative » se fait mortifĂšre (famines, intoxications, migrations, guerres, etc). . .
LâĂ©thique est humaine . . lâhomme non plus
Le grand shoot thermo-industriel des deux derniers siĂšcles du pĂ©trole sâachĂšve. Tels sont les temps qui viennent. Ce nâest pas la croissance qui dicte les approvisionnements en Ă©nergie et en matiĂšres premiĂšres, mais lâinverse. Et c’est cet approvisionnement par la puissance extractiviste, qui dicte la puissance Ă©conomique effective. Or les signes de l’Ă©puisement extractiviste se manifestent dĂ©jĂ , les coĂ»ts marginaux dâextraction grimpent, les pays Ă©mergents accroissent leur consommation et tendent les marchĂ©s, les conflits autour des filons sâenveniment, etc. Au moment oĂč la globalisation atteint ses limites physiques, elle atteint sa finitude, câest-Ă -dire lâimpossibilitĂ© de croĂźtre indĂ©finiment dans un espace fermĂ©.
Par ailleurs, lâinĂ©galitarisme lui-mĂȘme pourrit le nĂ©olibĂ©ralisme de lâintĂ©rieur. Les derniers investisseurs nâinnovent et ne se concurrencent que sur les marchĂ©s solvables, ceux du surĂ©quipement des nantis, mais en aucun cas ceux de la satisfaction des besoins primaires des populations exsangues, puisquâinsolvables. Le « ruissellement » existe bel et bien, mais il n’est pas celui du partage des richesses, de la satisfaction des besoins, il est celui de la puissance prĂ©datrice des infrastructures qui pillent les ressources de tous pour les concentrer dans le patrimoine de quelques uns.
La fascination technologique nous amuse et nous abuse. Le nombre dâobjets connectĂ©s aux apports illusoires explose, pendant qu’explosent non moins le nombre des victimes de famines pourtant rassasiables, de guerres prĂ©datrices aux motifs fallacieux, de pollutions hypocrites et d’Ă©pidĂ©mies relĂ©guĂ©es. Des tours dâacier et de verre sâĂ©lĂšvent au coeur des riches mĂ©tropoles pendant que des villes de toile sâĂ©tendent et se pĂ©rennisent dans les dĂ©serts dâaccueil. Des camps de rĂ©tention se multiplient au pied des frontiĂšres barbelĂ©es, ainsi que des murs de sĂ©grĂ©gations ethniques, des bateaux de rĂ©fugiĂ©s rejetĂ©s de ports en ports, etc., pendant que des shootĂ©s dâintelligence artificielle sâĂ©changent via satellites des images de chatons mignons ou des commentaires de trolls salaces.
OĂč est passĂ©e la main invisible dâAdam Smith qui devait si rationnellement harmoniser les demandes et les offres en fonction des besoins et des moyens ? Adam Smith et tous ses thurifĂ©raires ont oubliĂ© les externalitĂ©s du productivisme-consumĂ©risme ; l’erreur est d’autant plus funeste que ces externalitĂ©s sont plĂ©thoriques et on ne peut plus dĂ©lĂ©tĂšres.Dans nos pays prĂ©tendument dĂ©veloppĂ©s, quelques dizaines d’annĂ©es de gains de productivitĂ© Ă marche forcĂ©e, de rĂ©ductions progressives des droits du travail, de robotisation, d’automatisation, de dĂ©mantĂšlement des services publics, de creusement des dettes privĂ©es et publiques, etc., ont permis de maquiller ce ralentissement en affichant une bonne mine aux PIBs de rĂ©fĂ©rence. Mais le renversement de tendance ne sâarrĂȘtera plus, le fard commence Ă fondre.
Inexorablement, les signes dâasphyxie des Ă©conomies nĂ©olibĂ©rales mondiales vont se multiplier et ce ne sont pas les injections accommodantes de monnaie et autres mĂ©canismes bancaires de tolĂ©rance aux dĂ©ficits et aux dettes qui desserreront ce noeud gordien, au contraire. Lâeffondrement qui vient est dĂ©jĂ lĂ , il est systĂ©mique, Ă©conomique et financier, bien avant dâĂȘtre physique, biologique et climatique. Rien nâest plus fragile et sans rĂ©silience quâun tel systĂšme sophistiquĂ© de flux tendus rĂ©ticulaires et rivaux. OĂč et quand va se glisser le prochain grain de sable ? Le prochain bug ?La dĂ©croissance nâest plus une option politique pour Ă©colo-anarchistes, elle est dĂ©sormais une contingence, une contrainte physique inflexible.
Malheureusement, lâeuphorie techno-productiviste a eu le temps dâoffrir un confort consumĂ©riste dĂ©jĂ addictif, pour les gouvernants autant que pour nombre d’agents Ă©conomiques intermĂ©diaires, de sorte que la dĂ©croissance qui vient sâannonce comme une cure de dĂ©sintoxication dâune extrĂȘme violence. Câest la raison pour laquelle on assiste Ă la curĂ©e des derniĂšres puissances sur les derniĂšres ressources et les derniers profits. Câest la raison pour laquelle cette curĂ©e prend de plus en plus des allures de tensions gĂ©opolitiques et donc d’affrontements militaires. Comment nos sociĂ©tĂ©s inĂ©galitaires, qui nâont jamais su partager Ă©quitablement les bĂ©nĂ©fices du grand shoot sauraient-elles faire montre de justice et de solidaritĂ© au moment de partager pacifiquement le sevrage ?
Comment les derniers trĂ©sors vitaux ne bĂ©nĂ©ficieraient-ils pas dâabord aux plus forts, aux plus futĂ©s et aux plus riches, Ă commencer par ceux qui sont Ă la fois forts, futĂ©s et riches, qui le savent et qui sont armĂ©s ?Lâentropie sâest accrue exponentiellement, les dĂ©gĂąts Ă©cologiques (au sens large) sont devenus manifestes et les consciences instruites plus nombreuses. DĂ©sormais, lâhypothĂšse dâune fin de notre monde nâest plus une probabilitĂ© mais une certitude, il nây a de doute que sur le scĂ©nario, le rythme et le calendrier. Lâeffondrement sera entropique, irrĂ©versible selon le 2nd principe de la thermodynamique, et aussi soudain que fortuit selon les lois chaotiques des systĂšmes dynamiques instables. Câest sans doute pour trĂšs bientĂŽt, les lois de la physique le disent, elles ne font pas de politique, elles sont incorruptibles.
Ce qui Ă©merge du grand gĂąchis, engendrĂ© par la surexploitation des ressources et des hommes, est une sĂ©paration de plus en plus marquĂ©e, entre les frustrĂ©s qui sâinsurgent et les comblĂ©s qui se protĂšgent. Autrement dit, selon les lignes plus abruptes des perspectives qui se dessinent, entre dâune part les crĂšve-la-faim condamnĂ©s Ă pĂ©rir les premiers et qui sây refusent, et dâautre part, les repus qui jouissent encore dâespĂ©rer survivre un peu plus tard et qui se cramponnent.Si partage il y a, il sera nĂ©cessairement coercitif . . ou ne sera pas. Il y a quelques dĂ©cennies encore, les dĂ©bats Ă©taient dominĂ©s par lâĂ©conomie et se jouaient, grosso modo, entre sociaux solidaires (alias les gauches, plus ou moins bourgeoises et conformistes, soucieuses dâattĂ©nuer les souffrances du plus grand nombre en comptant stupidement sur la bienveillance des mieux lotis) et libĂ©raux rivalitaires (alias les droites, plus ou moins normatives et conservatrices, soucieuses dâoptimiser les profits des mieux lotis en comptant sur la soumission du plus grand nombre).
Ces disputes, ces luttes quelques fois mĂȘme, autour du partage inĂ©galitaire des richesses, occultaient les autres dĂ©bats. A commencer par le dĂ©bat Ă©cologique qui, lui, se limitait pour lâessentiel Ă lâopposition entre les archaĂŻques (conservateurs catastrophistes technophobes) et les modernes (progressistes productivistes technophiles) encore Ă©merveillĂ©s par les prouesses des magiciens technologiques. Ce temps est fini, ces dĂ©bats ne sont pas clos mais mutent, et il faut y ajouter dĂ©sormais les impĂ©ratifs Ă©thiques qui devraient guider la gouvernance des effondrements probables. Câest dire si on part de loin . . c’est dire qu’il ne nous reste peut-ĂȘtre qu’à « bricoler dans l’incurable ».
LâhumanitĂ© doit apprĂ©hender sa fin, tout comme chaque individu le fait le moment venu, mais comment ? Politiquement et surtout Ă©thiquement ? Quâen est-il, dâores et dĂ©jĂ , pour les puissants qui ont compris lâenjeu ? Peut-on dire que les vainqueurs nĂ©olibĂ©raux trahissent le peuple des perdants ? Certes ils ne font pas cause commune avec un ennemi, mais câest pire, câest eux-mĂȘmes qui se font lâennemi du peuple, ils lâabandonnent, s’en dĂ©barrassent. « LâuniformitĂ© (âŠ) ne signifie plus lâĂ©galitĂ©. Au contraire, lâenjeu nâest plus dâapporter la mĂȘme chose Ă tous, câest de fournir Ă chacun ce dont il a besoin. (âŠ) câest le renouveau de la solidaritĂ©. » Ă©crit Macron, dans sa profession de foi « RĂ©volution », une rĂ©volution au sens littĂ©ral, une contre-rĂ©volution au sens historique, une mystification de plus.
Autant dire la fin de lâĂ©galitĂ© et de la fraternitĂ© au bĂ©nĂ©fice de la seule libertĂ© individuelle, celle des maĂźtres qui veulent dĂ©cider seuls de « qui Ă besoin de quoi » . . pour que voguent leurs chaloupes. Le nĂ©olibĂ©ralisme n’est-il pas dĂ©jĂ devenu un exterminisme ? Ni malthusien, quoique, ni suprĂ©maciste, quoique, mais non moins sauvage, monstrueux, injustifiable.Câest ainsi que le mĂ©pris de classe, lâarrogance, la superbe, sâexpriment ad nauseam dans le discours des communicants nĂ©olibĂ©raux, ainsi qu’au fil des chroniques de leurs mĂ©dias dĂ©fĂ©rents. Sur le fond, ces mots cachent Ă peine Ă qui sait les entendre, lâindignitĂ©, le dĂ©goĂ»t et lâavanie des maĂźtres Ă lâendroit de ceux quâils maintiennent en servitude. Alors que le monde sâeffondre, les puissants ont dĂ©libĂ©rĂ©ment dĂ©cidĂ© de sacrifier la vile multitude pour maintenir cet ordre inique le plus longtemps possible.
La fin quâils caressent justifie les moyens amples et pervers dont ils disposent par hĂ©ritage, par prĂ©dation ou par escroquerie. Pour ceux qui peuvent se sauver un temps soit peu, les « premiers de cordĂ©e » dâabord, ce nâest ni la philanthropie ni lâaltruisme qui vont les retenir dâabuser de leur puissance.Les grandes puissances ont intĂ©grĂ© lâeffondrement qui vient depuis 30 Ă 40 ans. Ils savent que la menace Ă©cologique nâest pas la pire, dâautres plus sourdes et plus immĂ©diates disloquent dĂ©jĂ les habitudes. Lâhorizon gĂ©opolitique sâassombrit. Pour les gros joueurs, lâheure nâest plus aux palabres mais aux prises de positions fortes, ou au moins au renforcement des positions acquises. Les rĂ©gimes autoritaires se multiplient et se renforcent. Les puissances qui se disent encore dĂ©mocratiques se font insensiblement dĂ©mocratures.
Ici, les financiers qui avaient dĂ©jĂ pris Bercy ont dĂ©sormais la main sur lâElysĂ©e. Pourquoi abandonneraient-ils une si bonne dynamique en si belle position ? Leurs banques centrales, la BCE toute comme la FED et la BPC, seront accomodantes jusqu’au bout. Pourquoi abandonneraient-ils cette promesse confortable d’un accompagnement palliatif terminal ?Les jeux sont faits ? . . Rien ne va plus ? . . Nous avons encore le choix, celui de disparaĂźtre ou non dans la dignitĂ©. Pour le psychologue, câest lâaffaire de chacun. Pour le politologue, a minima Ă lâĂ©chelle de la nation, lĂ oĂč notre corps social se fonde encore sur un patrimoine dâaffects communs, ici en France la LibertĂ©-ĂgalitĂ©-FraternitĂ©, le minimum de dignitĂ© est de fonder une VIĂšme rĂ©publique citoyenne pour y gouverner le juste partage du dernier sevrage. Ici en France, la macronie ne manquera pas de sây opposer coĂ»te-que-coĂ»te, la contre-rĂ©volution bourgeoise fera tout pour conserver ses privilĂšges, fĂ»t-ce sur le dos des peuples indigĂšnes et migrants.
Ce sera le mĂȘme combat d’un bout Ă l’autre du continent europĂ©en, Ă l’ombre de la lutte impĂ©riale finale entre la Chine et les Ătats-Unis.Peut-on fonder une dĂ©mocratie rĂ©elle dans le sillage des revendications des Gilets Jaunes ? Oui sâil sâagit de se dĂ©clarer « peuple constituant » au sein et au-delĂ des seuls Gilets Jaunes. TĂąche « performative » mais nĂ©anmoins difficile car il sâagit de sâentendre entre mouvances diffĂ©rentes, voire entre adversaires idĂ©ologiques, pour Ă©tablir les rĂšgles constitutionnelles dans le cadre desquelles on pourra ensuite dĂ©battre sans fin, se disputer sans fin, puis voter des lois majoritaires, non pas consensuelles mais consenties. La dĂ©mocratie ce n’est pas le consensus, mais l’Ă©ternelle dĂ©libĂ©ration comme seul remĂšde pacificateur aux conflits qu’excitent en permanence les inĂ©vitables dissensus. La dĂ©mocratie câest le dĂ©bat, sinon . . c’est la chiourme.Comment mobiliser un peuple pour un tel projet ? La peur ne mobilise pas, elle paralyse.
La luciditĂ© ne mobilise pas toujours, elle fatalise et rĂ©signe les peureux. En un mot, lâhumanisme est humain . . mais lâhomme non plus. Il faut donc entreprendre de refonder la RĂ©publique, mĂȘme si la tĂąche est malaisĂ©e et pĂ©rilleuse, condition sans laquelle elle ne sera jamais « Ă©thique » ! Si nous le voulons, elle pourrait ĂȘtre une dĂ©mocratie reprĂ©sentative, donc dĂ©libĂ©rative parlementaire, non pas capturĂ©e par des reprĂ©sentants tuteurs du peuple, mais par des reprĂ©sentants agréés par celui-ci, instruits et contrĂŽlĂ©s par des citoyens aptes Ă user de leurs droits ultimes de proposition et de rĂ©vocation. Alors, et alors seulement, un vote serait enfin une voix, ce quâil nâest toujours pas aujourdâhui.
Si ce moment advient, ce ne sera que le dĂ©but dâĂ©preuves beaucoup difficiles encore (dĂ©carbonation des processus thermo-industriels, transition Ă©cologique soutenable, gratuitĂ© des besoins fondamentaux et des services vitaux, Ă©thique financiĂšre non spĂ©culative, arbitrages gĂ©opolitiques Ă©thiques, etc.), mais gouvernables alors avec tellement plus de dignitĂ© et dâexemplaritĂ© . . Des Ă©preuves d’autant plus difficiles qu’elles se heurteront inĂ©vitablement aux puissances rĂ©actionnaires accrochĂ©es au statu quo : les puissances Ă©conomiques transnationales pour l’essentiel, accompagnĂ©es de leurs domesticitĂ©s, des oligarques corrompus jusqu’aux classes moyennes dĂ©fĂ©rentes, enfumĂ©es ou endormies.Il n’y a de paradis nulle part ; en refusant le purgatoire dĂ©mocratique on s’abandonne Ă l’enfer despotique, aujourd’hui celui de lâextrĂȘme-centre nĂ©olibĂ©ral, ordolibĂ©ral, oligarchique, ploutocratique, corrompu et corrupteur. Demain, . . mais c’Ă©tait quand demain ?
jef Safi
Titres alternatifs :
– Les jeux sont faits ? . . rien ne va plus !
– Quand Donald rencontre Margaret . .
– Ceci n’est pas un Rond-Point . .
– Alex . . au pied, rend les papiers !
– Ceci n’est pas un Grand DĂ©bat . .
– Ă chacun selon « mes » besoins . .
– . ./. .
(2) Le droit de propriété (wikipedia) / Usus (wikipedia) / Fructus (wikipedia) / Abusus (wikipedia) /
Les inserts vidĂ©os ci-dessous sont une sĂ©lection des Ă©pisodes que nous jugeons significatifs et les analyses que nous estimons pertinentes de la pĂ©riode. Il s’agit d’un point de vue ouvert Ă la critique i.e. au « dĂ©bat aussi objectif et raisonnĂ© que possible, Ă©cartant l’autoritĂ© des dogmes, des conventions ou des prĂ©jugĂ©s, auquel on soumet quelqu’un ou quelque chose pour mieux en apprĂ©hender les caractĂ©ristiques, y compris un jugement des qualitĂ©s et des imperfections ». Pour une sĂ©lection plus ample et plus profonde et pour ne rien perdre de ce qui vaut d’ĂȘtre lu et entendu (de notre point de vue), vous ĂȘtes invitĂ©s Ă parcourir les contenus qu’indexe le bloc-note Entropy â„ Memory * Creativity ÂČ . ./. .
L’Ăšre d’un « peuple de citoyens constituants » n’est pas une chimĂšre mais un impĂ©ratif Ă©thique. L’entretien complet de Chantal Mouffe est ICI . .
Qui a peur du peuple aujourd’hui ? En premier lieu l’oligarchie dont les hommes au gouvernement sont les fondĂ©s de pouvoir dĂ©tenteurs de la violence lĂ©gitime institutionnelle qu’exercent les « forces de l’ordre » qui ne sont plus les « gardiens de la paix ». Cette peur des gouvernants et de leurs parrains est rĂ©vĂ©lĂ©e par les ordres qu’ils donnent aux « forces de l’ordre » quand celles-ci outrepassent criminellement les limites de leur mission .
Qu’est-ce qu’une « dĂ©mocratie reprĂ©sentative » ? C’est une mise sous tutelle si le citoyen n’est pas constituant. Qu’est-ce qu’un citoyen constituant ? C’est un citoyen qui participe de son plein grĂ© Ă la vie de la citĂ©. C’est-Ă -dire qui partage avec ses concitoyens le pouvoir de faire la constitution, de faire la loi, d’Ă©lire et/ou d’ĂȘtre Ă©lu, s’il est Ă©lu d’ĂȘtre mandatĂ© et contrĂŽlĂ© par ses Ă©lecteurs et, le cas Ă©chĂ©ant, d’ĂȘtre destituĂ© s’il est jugĂ© dĂ©faillant.
ICI : Quelle démocratie représentative ?
J.Cagé, C.Girard, F.Boulo & M.LarrÚre
(ArrĂȘt Sur Images)
Pourquoi nos voisins britaniques sont-ils enfermĂ©s dans une impasse entre « ne pas rester » et « ne pas partir » ? Pourquoi leurs voisins, que nous sommes, leur tordent-ils le bras pour qu’ils restent aux conditions de l’UE ou qu’ils s’effondrent sinon ? Pourquoi, ni les uns ni les autres, ne veulent-ils voir qu’Ă poser le problĂšme en termes binaires, ils se condamnent Ă ne jamais le rĂ©soudre ? Les anglais ne veulent pas mourir seuls Ă la dĂ©rive (mĂȘme si certains d’entre-eux prĂ©fĂšrent ce sort par dignitĂ©), mais ils ne veulent pas non plus mourir dans la prison ordolibĂ©rale allemande (mĂȘme si certains d’entre-eux prĂ©fĂšrent ce sort par vĂ©nalitĂ©). C’est parce que les traitĂ©s qui fondent l’UE sont dĂ©testables qu’ils sont dĂ©testĂ©s, qui faut-il ĂȘtre pour le nier ? « L’UE qui sĂšme la compĂ©tition et l’adversitĂ© rĂ©colte la colĂšre et le refus de vivre ensemble des peuples. » Ce n’est pas vouloir quitter l’Europe que de le dire, mais c’est vouloir refonder ses traitĂ©s sur la base des convergences sociales et Ă©cologiques.
Autrement dit, l’insurrection des Gilets Jaunes en France et le Brexit en Grande Bretagne sont-ils deux symptĂŽmes du mĂȘme problĂšme europĂ©en ? Oui . . de tout Ă©vidence !
Les Gilets Jaunes exigent que la politique reprenne le pouvoir pour s’opposer au totalitarisme ordolibĂ©ral de l’UE . . Les brexiteurs aussi ! Qu’attend-on pour refonder les traitĂ©s europĂ©ens pacifiquement ? Attend-on que l’Europe explose chaotiquement, qu’elle s’effondre, pour n’importe quelles raisons fortuites, et avec des xĂ©nophobes fascisants d’ores et dĂ©jĂ au pouvoir un peu partout ?
FĂ©vrier 2o19 marque une Ă©tape majeure de l’insurrection des Gilets Jaunes. La gouvernance de Macron peut Ă©chouer dans sa tentative autoritaire de contre-rĂ©volution ordolibĂ©rale, câest mĂȘme dĂ©sormais son issue la plus probable. 1/ Parce que le peuple a dĂ©cidĂ© de reprendre la main sur son Ă©tat social et solidaire et quâil nây renoncera plus. 2/ Parce que lâĂ©conomie mondiale et europĂ©enne en particulier, dĂ©sormais en tension et en contraction durables, ne lui donneront plus les moyens dâentretenir ses domesticitĂ©s oligarchiques.
Malheureusement, pour le moment, faute de dissoudre l’assemblĂ©e, il croit encore pouvoir dissoudre le peuple soulevĂ© (rĂ©primer, judiciariser, etc.) et enfumer le peuple apeurĂ© (pseudo-dĂ©bats, pseudo-mĂ©dias, etc.). En ne capitulant pas, il va au mieux perdre un temps dommageable, au pire aggraver la situation.
Mais le peuple soulevĂ© peut Ă©chouer lui aussi. Il lui faut impĂ©rativement rĂ©sister aux tentations implosives, que ce soit 1/ par la dispersion en nombreuses tendances aussi rivales que nĂ©gligeables, ou que ce soit 2/ par une concentration sous une seule banniĂšre rĂ©cupĂ©ratrice. Ce que la stratĂ©gie programmatique de LFI avait rĂ©ussi en renonçant Ă lâalliance des Ă©tiquettes du Front de Gauche, jusquâĂ la candidature de 2o17, lâinsurrection des Gilets Jaunes va devoir le refaire sans leadership emblĂ©matique, en fĂ©dĂ©rant plus largement encore toutes les mouvances plus ou moins rĂ©volutionnaires, dĂ©jĂ constituĂ©es ou non, pour forcer la Macronie Ă capituler (ce qu’elle ne fera jamais sans rĂ©sister par tous les moyens disponibles).
Alors, et alors seulement, la sortie par le haut sera possible avec la crĂ©ation dâune AssemblĂ©e Constituante pour fonder une VIe rĂ©publique dĂ©mocratique « participative » Ă©videmment, mais parlementaire « dĂ©libĂ©rative » nĂ©cessairement, et primo-ministĂ©rielle seulement pour coordonner les pouvoirs sans les rĂ©genter. Si ce moment advient, ce ne sera alors que le dĂ©but dâĂ©preuves beaucoup difficiles encore (transition Ă©cologique, rĂ©forme de lâEU, rĂ©forme de lâEuro, arbitrages financiers, arbitrages gĂ©opolitiques, etc), mais avec tellement plus de dignitĂ© et dâexemplaritĂ© . . Des Ă©preuves d’autant plus difficiles que le rĂȘve de « consensus dĂ©mocratique » se heurtera inĂ©vitablement Ă la rĂ©alitĂ© du dissensus contre les puissances rĂ©actionnaires, hĂ©tĂ©rogĂšnes mais unifiĂ©s par leur mĂȘme aversion au partage: les puissances Ă©conomiques en premier lieu, nationales et transnationales, mais aussi leurs domesticitĂ©s depuis les groupuscules opportunistes (les Ă©pouvantails utiles, consentants ou fortuits, sĂ©ditieux Ă©gotistes et comploteurs complotistes) jusqu’aux classes moyennes dĂ©fĂ©rentes (les « ça-me-suffit » enchantĂ©s, gros et petits bourgeois, pĂ©tainistes et flattĂ©s bienheureux).
âââL E ââV R A I ââD E B A T , ââc’est ââI C I ââ! !
A l’heure oĂč l’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral humain impose des gouvernances « collectivistes et solidaires » des communs, le systĂšme nĂ©olibĂ©ral maintient et durcit sa ligne politique prĂ©datrice mue par les seuls intĂ©rĂȘts de l’oligarchie bourgeoise et financiĂšre. C’est ainsi que les entreprises d’Ă©tat qui appartiennent Ă tous, qui sont « le patrimoine de ceux qui n’en ont pas », sont bradĂ©es aux intĂ©rĂȘts particuliers des amis de la macronie. Outre que cette politique est une spoliation des citoyens, elle favorise l’accĂ©lĂ©ration des catastrophes sociales et Ă©cologiques qu’elle accompagne sans les combattre.
Nous vivons une rĂ©volution citoyenne que les Gilets Jaunes ont d’ores et dĂ©jĂ gagnĂ©e mĂȘme si nul ne sait oĂč elle va dĂ©sormais. C’est comme ça depuis toujours, le prĂ©sent est fait de son histoire et l’histoire s’Ă©crit en marchant au prĂ©sent. Gouverner se concentre dĂ©sormais autour de l’arbitrage entre l’AVOIR et l’ETRE, c’est-Ă -dire « tout simplement » entre la CONCURRENCE et l’ENTRAIDE. Au moment ou l’insurrection des Gilets Jaunes est le symptĂŽme manifeste d’une crise politique historique profonde, il s’agit d’opĂ©rer un changement de paradigme gouvernemental radical, social et Ă©cologique, financier et gĂ©opolitique, pas de manager comme un CEO affublĂ© de son DRH, une start-up distribuant des bons-points et des blĂąmes.
Au stade de décomposition de nos pseudo démocraties, de notre 5Úme république monarchique en particulier, les élections européennes du 26 mai se sont jouées à qui-perd-gagne, fatalement.
Les deux corps sociaux gagnants sont ceux dont personne ne parle. Les abstantionnistes d’une part, dont le score de 50% surpasse de trĂšs loin celui des Ă©lus du podium. Et les gouverneurs effectifs de lâĂ©conomie d’autre part qui, discrets, ni candidats ni Ă©lus, sâaccommodent fort bien de ce semblant de dĂ©bat qui ne change rien au statu quo dont ils profitent. Leur partie de monopoly-poker destructrice de l’Ă©tat social et solidaire peut continuer.
Les deux corps sociaux perdants sont ceux qui, nĂ©anmoins, se disputent le podium. Lâopposition dâextrĂȘme droite d’une part, avec 11.5% des inscrits, fait le plein des votes protestataires de ce moment de crise populaire, mais sans sortir de son Ă©tiage habituel. La macronie d’autre part, majoritĂ© gouvernementale ultralibĂ©rale dâextrĂȘme-centre, ne repose plus que sur 11% dâinscrits alors que son champion en rassemblait chichement 18% au 1er tour des prĂ©sidentielles. DrĂŽle de lĂ©gitimitĂ©, et funeste exclusion de facto de 78% des Ă©lecteurs qui se voient rejetĂ©s de tout dĂ©bat !
Les autres candidatures se sont Ă©parpillĂ©es façon puzzle. La mauvaise surprise est le score de LFI qui ne profite pas de son soutien aux revendications sociales des Gilets Jaunes (partagĂ©s quant Ă eux entre RN et abstentions) et qui, dĂ©laissant la difficile campagne Ă©cosocialiste de « lâavenir en commun », voit les fruits de son combat Ă©cologique cueillispar EELV et son projet dĂ©mocratique de 6Ăšme rĂ©publique passer sous silence. La surprise est aussi le score dâEELV qui tĂ©moigne des fortes sensibilisations et mobilisations Ă©cologiques des jeunes Ă©lecteurs (pris aussi pour partie Ă LREM).
Au regard du discours de Yannick Jadot c’est une bonne nouvelle pour l’Ă©cologie, mais qu’en sera-t-il dans l’action sociale et politique ? Il nây aura de refondation Ă©cosocialiste nationale et europĂ©enne, 1/ que si LFI recentre ses campagnes sur « l’avenir en commun » en l’Ă©largissant Ă la gauche radicale europĂ©enne ; 2/ et que si EELV ne se laisse pas glisser vers lâĂ©colo-libĂ©ralisme de ses alliĂ©s europĂ©ens. Jadot se dit anticapitaliste, connait le piĂšge oĂč tomba naguĂšre Hulot Ă l’ombre de Macron, mais qu’en sera-t-il dans l’action face Ă la majoritĂ© ordo-libĂ©rale ? On peut craindre que le green-washing ait de « beaux » et tristes jours devant lui. Quel groupe EELV va-t-il rejoindre au parlement europĂ©en pour combattre cette Ă©cologie de façade ?
Les ordo-libĂ©raux gardent la main. AprĂšs 30 ans de catĂ©chisme usurier des uns et de fausses contritions sociales-dĂ©mocrates des autres, le statu quo europĂ©en perpĂ©tue la ligne la plus stupide, tout faire pour que rien ne change. Elle mĂšne inĂ©vitablement Ă un nĂ©olibĂ©ralisme autoritaire, dĂ©jà « en marche » avec Macron, et au clash de l’UE et de sa monnaie inique.
Et maintenant ? Il n’est pas trop tard pour poursuivre l’Ă©laboration du « moment populiste » (au sens de Chantal Mouffe), c’est-Ă -dire concrĂštement de « fĂ©dĂ©rer le peuple pour refonder la gauche » (au sens de la LFI) et non pas d’en rafistoler les dĂ©bris du passĂ© social-dĂ©mocrate ! Alors et alors seulement on pourrait sortir du piĂšge de la Ve rĂ©publique qui lĂ©gitime un pouvoir minoritaire, donc autoritaire, coaguler une fĂ©dĂ©ration populaire Ă©galitaire autour et au-delĂ des Gilets Jaunes, puis sortir du piĂšge de l’UE en oeuvrant Ă refonder une Europe d’Ă©tats coopĂ©rants et non pas d’Ă©tats concurrents.
Bilan de rentrĂ©e ? Rien n’est rĂ©glĂ©, au contraire ! ? « Tournez la question comme vous voulez. Nous n’avons d’autres alternatives que d’oser l’impossible, ou de ramper comme des larves sous le talon de fer qui nous Ă©crase. » (Raoul Vaneigen – Le Monde du 31 08 2o19). Ce sera le cas, tĂŽt ou tard, radicalement, nĂ©cessairement. MalgrĂ© les questions tĂ©lĂ©phonĂ©es, doxiques donc indigentes de Lenglet, les analyses de Todd sont lucides et limpides. Ne reste Ă notre dĂ©mographe anthropologue qu’Ă intĂ©grer les rĂ©alitĂ©s physiques des conditions de possibilitĂ© d’un effondrement systĂ©mique avant l’horizon procrastinĂ© du GIEC (Todd n’est toujours pas physicien, dommage !) et Ă intĂ©grer la rĂ©alitĂ© d’une gouvernance ultralibĂ©rale de plus en plus totalitaire, feutrĂ©e en apparence mais nĂ©anmoins fascisante (Todd, trop anglo-saxon, n’est pas suffisamment politologue, dommage !).
Le jeune arrogant pistonnĂ© Ă l’ElysĂ©e, qui avait dĂ©jĂ atteint son seuil d’incompĂ©tence dĂšs l’affaire Benalla, dĂ©sormais s’enlise et ne se maintient que par la pression de ses forces de l’ordre. Reste au peuple Ă tracer la ligne Rouge&Verte autour de la Ligne Jaune d’un Front Populaire Ecologiste qui, le moment venu, contraindra le totalitarisme nĂ©olibĂ©ral Ă capituler. Le temps presse, car la macronie d’extrĂȘme-centre, Ă l’aide de son Ă©pouvantail utile d’extrĂȘme-droite, achĂšve dĂ©jĂ sa besogne de destruction systĂ©matique de l’Ă©tat social. Cette course de vitesse est en cours . . :
Les inserts vidĂ©os ci-dessus sont une sĂ©lection des Ă©pisodes que nous jugeons significatifs et les analyses que nous estimons pertinentes de la pĂ©riode. Il s’agit d’un point de vue ouvert Ă la critique i.e. au « dĂ©bat aussi objectif et raisonnĂ© que possible, Ă©cartant l’autoritĂ© des dogmes, des conventions ou des prĂ©jugĂ©s, auquel on soumet quelqu’un ou quelque chose pour mieux en apprĂ©hender les caractĂ©ristiques, y compris un jugement des qualitĂ©s et des imperfections ». Pour une sĂ©lection plus ample et plus profonde et pour ne rien perdre de ce qui vaut d’ĂȘtre lu et entendu (de notre point de vue), vous ĂȘtes invitĂ©s Ă parcourir les contenus qu’indexe le bloc-note Entropy â„ Memory * Creativity ÂČ . ./. .