édito 2o1o
. . co~errAnce
persévérer dans l’être
miroir, désapparAnce
anaboliser le Grand Autre
illusoire transcendAnce
conatus contre conatus
spontanaissance d’idiome
désirAnce, résiliAnce
phénomène, phénome
plis de signes, boues de sens
absence, éternel retour
dispars épars, fragmAnces
co~errAnce, amour
mimésir, hérésir
hétéromogènes continuités
catharsir, déchoisir
congruAntes sérendipités
linéament contre linéament
extimités ultimes
monade contre monade
au vide médian s’intiment . .
jef Safi
jef safi : Soit ! Posons qu’il s’agit d’un film. Quel en est le synopsis ? Qui veut faire le pitch ?
Laozi :
« De la Voie (Dào) naquit l’Un, d’Un naquit Deux, de Deux naquit Trois, et Trois engendra les Dix Mille.
Les Dix Mille portent Yin sur le dos, et Yang dans les bras, puisant l’harmonie à leurs souffles.
Lequel des Dix Mille voudrait être orphelin, esseulé, indigent ? C’est pourtant ainsi que se disent les princes.
Qui gagne perd et qui perd gagne. » ( Daodejing )
jef safi : Cosmologique, métaphysique, ‘pictosophique, certes. Mais pourquoi interceptif, parallactique ? Pour quoi faire ?
Laozi :
« Qui va contre l’ordre des choses, hâte son agonie. Qui accompagne l’ordre des choses l’infléchit avec lui.
Entre la Terre et le Ciel, embrasse le souffle, éprouve l’harmonie. » ( Daodejing )
jef safi : Que sont ces choses ? Quel est l’ordre de ces choses ?
Laozi :
« Pour avoir de la connaissance, ajoute des choses chaque jour.
Pour avoir de la sagesse, enlève des choses chaque jour. » ( Daodejing )
jef safi : J’ai trouvé les moniteurs. Je joue avec les Deux, les Trois et les dix mille. J’essaie d’infléchir le cours des choses, de le maintenir pour découvrir toutes les .. ‘pictures, mais je ne parviens pas à entrenir le flot assez longtemps. Il s’éteint très vite, pourquoi ?
Héraclite d’Ephèse :
« Ce monde, le même pour tous, ni dieu ni homme ne l’a fait, mais il a toujours été, il est et il sera toujours le feu vivant, consumant avec mesure et s’éteignant avec mesure. » ( Fragment 30 d’après Clément d’Alexandrie » )
jef safi : .. et dont chaque embrasement est aussi surprenant que .. lassant. Pourquoi ?
Héraclite d’Ephèse :
« À ceux qui descendent dans les mêmes fleuves surviennent toujours d’autres et d’autres eaux. » ( Fragment 12 d’après Arius Didyme )
jef safi : Une sorte d’éternelle noyade en somme ? Comment l’appeler autrement ?
Zhuangzi :
« Les mots servent à exprimer les idées ; quand l’idée est saisie, oublie les mots. »
jef safi : L’intelligible comme le sensible ? .. Le tout comme le rien ? .. La vie comme la mort ?
Zhuangzi :
« Vivre, c’est un hasard du temps ; mourir, c’est se conformer à la loi de la nature. »
jef safi : Mais je veux vivre, .. au moins survivre le temps d’apprendre à mourir serein. Est-ce aussi le sort de ces .. choses ?
Baruch Spinoza :
« Toute chose, autant qu’il est en elle, s’efforce de persévérer dans son être. » (Éthique III, Proposition VI)
jef safi : Ainsi suis-je .. persévérant .. une chose comme une autre ..
Baruch Spinoza :
« L’effort par lequel toute chose tend à persévérer dans son être n’est rien de plus que l’essence actuelle de cette chose. »
(Éthique III, Proposition VII)
jef safi : Rien de plus ? .. illusoire en somme .. mais transcendante d’être actuelle .. !
Baruch Spinoza :
« Il n’y a pas de chose singulière, dans la nature des choses, qu’il n’y en ait une autre plus puissante et plus forte. Mais, étant donnée une chose quelconque, il y en a une autre plus puissante, par qui la première peut être détruite. » (Éthique IV, la servitude humaine – des forces des affects AXIOME)
jef safi : Compris. Interagissant, me voilà persévérant dans mon être virtuel, de toute ma puissance réelle. Pour autant, je ne peux pénétrer ce monde pour m’y mouvoir moi-même.
Gottfried Wilheim Leibniz :
« … la géométrie ou philosophie du lieu fournit un degré pour la philosophie du mouvement et du corps, et de même la philosophie du mouvement pour la science de l’esprit. » ( lettre à Arnauld )
jef safi : .. s’y mouvoir par l’esprit ? Mais néanmoins interagir réellement ? Comment y survivre ainsi d’une strate à l’autre ?
Gottfried Wilheim Leibniz :
« L’action du principe interne, qui fait le changement ou le passage d’une perception à une autre, peut être appelé Appetition ; il est vray, que l’appetit ne sauroit tousjours parvenir entierement à toute la perception, où il tend, mais il en obtient tousjours quelque chose, et parvient à des perceptions nouvelles. » ( Monadologie – 15 )
jef safi : Ainsi suis-je .. une monade chasseresse, prédatrice. Quelles sont mes proies dans ce bric-à-brac ?
Gottfried Wilheim Leibniz :
« … il n’y a rien d’inculte, de sterile, de mort dans l’univers, point de Chaos, point de confusions qu’en apparence ; à peu pres comme il en paroîtroit dans un étang à une distance, dans laquelle on verroit un mouvement confus et grouillement pour ainsi dire de poissons de l’étang, sans discerner les poissons mêmes. » ( Monadologie – 69 )
jef safi : .. à moi de le sentir par intuition ? Appetition ? Désir ? Autant de conditions de possibilités de connaissances qui ne m’ouvrent pas les yeux ?
Friedrich Nietzsche :
« Le monde est plus profond que le jour ne l’imagine. »
jef safi : .. et plus je me cherche dans cette obscurité, plus le prédateur que je prétends être se sent devenir proie.
Friedrich Nietzsche :
« Et ainsi de celui qui l’engendra comme celui qui en va naître et ainsi de suite en avant et en arrière ! Tout a été là d’innombrables fois en ce sens que la situation d’ensemble de toutes les forces revient toujours. » ( Fragments posthumes du Gai Savoir – 11, 202 )
jef safi : .. un tour prédateur, un autre tour proie, .. voire les deux à la fois ?
Friedrich Nietzsche :
« L’éternel sablier de l’existence ne cesse d’être renversé à nouveau et toi avec lui, ô grain de poussière de la poussière ! »
( Le Gai Savoir – 341 )
jef safi : Je devine dans quel piège en vain je me débats. La Voie est-elle dans le non-agir comme pure intensité contemplative ?
Henri Bergson :
« A vrai dire il n’y a jamais d’immobilité véritable, si nous entendons par là une absence de mouvement. Le mouvement est la réalité même. »
( La perception du changement, La Pensée et le Mouvant )
jef safi : .. et le mouvement seulement ? .. Y compris celui des métamorphoses immobiles ? .. Là, je suis perdu !
Henri Bergson :
« Essayons de voir, non plus avec les yeux de la seule intelligence, qui ne saisit que le tout-fait et qui regarde du dehors, mais avec l’esprit, je veux dire avec cette faculté de voir qui est immanente à la faculté d’agir et qui jaillit, en quelque sorte, de la torsion du vouloir sur lui-même. » ( L’évolution créatrice )
jef safi : .. dialectique de la volonté captive d’elle-même ? .. j’appelle ça plutôt une dialemmatique ..
Henri Bergson :
« Nous appelons intuition la sympathie par laquelle on se transporte à l’intérieur d’un objet pour coïncider avec ce qu’il a d’unique et par conséquent d’inexprimable. » ( Introduction à la métaphysique, la pensée et le mouvant )
jef safi : C’est plus clair .. nous ne sommes pas monade extérieure, mais par mimesis celle que nous voulons être dans le film lui-même.
Paul Valery :
« Que serions-nous sans le secours de toutes ces choses qui n’existent pas ? »
jef safi : Nous sommes notre altérité tout entière, et à la fois un illusoire point de vue sur le monde que nous enveloppons et qui nous enveloppe. Nous sommes … ce que nous ne sommes pas ? .. notre propre complément au grand autre ?
Paul Valery :
« Nier A, c’est montrer A derrière une grille. »
jef safi : .. et la grille est le film lui-même, ou n’importe quelle autre interface, n’importe quelle autre fenêtre-miroir à travers laquelle interagir c’est être, c’est être par mimesis la monade que je veux être. C’est devenir par catharsis la monade que je ne suis pas, c’est devenir l’interface elle-même, le film lui-même s’il tel est mon .. désir. Qui serai-je, ici et maintenant, si je fermais la page, si j’arrêtais cette machine ?
Paul Valery :
« Tout commence par une interruption. »
jef safi : Je suis un commencement. Je me spontane une renaissance .. un next return !
Maurice Merleau-Ponty :
« Chaque création change, altère, éclaire, approfondit, confirme, exalte, recrée ou crée d’avance toutes les autres. »
jef safi : Toute ré-création n’est-elle pas qu’une ré-pétition ?
Maurice Merleau-Ponty :
« On ne voit que ce qu’on regarde. » ( L’Oeil et l’Esprit )
jef safi : .. comme toute ré-pétition dans le miroir, fut-elle ré-création intensive et intempestive.
Gilles Deleuze :
« […] Lorsque la communication est établie entre séries hétérogènes, quelque chose passe entre les bords, des évènements éclatent, des phénomènes fulgurent, des sujets peuplent le système, moi passifs, sujets larvaires. […] La différence dans l’intensité est l’objet de la rencontre, l’objet auquel la rencontre élève la sensibilité. Ce qui est rencontré, ce sont les démons, puissances du saut, de l’intervalle, de l’intensif ou de l’instant, qui ne comblent la différence qu’avec du différent. […] » ( Différence et répétition )
jef safi : .. pourquoi ces monitoring savants, conatus et autres attributs abscons .. comme autant de poids et .. démesures ? ..
Gilles Deleuze :
« […] on peut et on doit présenter les substances individuelles comme ayant des requisits, des caractères internes : c’est même ainsi que Leibniz récupère Aristote, et fait de la forme et de la matière, de la puissance active et de la puissance passive, les requisits de la substance. […] la région claire de la monade se prolonge dans la portion claire d’une autre, et, dans une même monade, la portion se prolonge infiniment dans les zones obscures, puisque chaque monade exprime le monde entier. […] Comme chaque monade exprime le monde entier, il ne peut plus y avoir qu’une seule notion pour un sujet, et les sujets-monades ne pourront se distinguer que par leur manière interne d’exprimer le monde : le principe de raison suffisante deviendra principe des indiscernables, il n’y a pas deux sujets semblables, pas d’individus semblables. » ( Le Pli – Leibniz et le baroque )
jef safi : .. ni même à lui-même ?.. la mimesis en soi-même ne serait que catharsis par anamnèse .. ? Etrange !
Gilles Deleuze :
« Il n’y a que l’étrange qui soit familier, et seulement la différence qui se répète. »
jef safi : .. ni image-temps, ni image-mouvement .. image-cristal ? .. le film n’est donc pas ce qu’on y voit, mais ce qu’il voit de ce que nous sommes ?
Gilles Deleuze :
« Les qualités et les étendues, les formes et les matières, les espèces et les parties ne sont pas premières ; elles sont emprisonnées dans les individus comme dans des cristaux. Et c’est le monde entier, comme dans une boule de cristal, qui se lit dans la profondeur mouvante des différences. » ( Différence et répétition )
jef safi : .. le film lui-même est monade, prédateur et proie. Il nous met en scène autant que nous pensons l’infléchir ? .. il nous pense autant que nous le pensons ? .. il nous projette ses signes autant que nous y projetons les nôtres ? .. méthode paréidolia-critique ?
Gilles Deleuze :
« Ce qui force à penser c’est le signe. […] L’acte de penser ne découle pas d’une simple possibilité naturelle. L’acte de penser est, au contraire, la seule création véritable. La création c’est la génèse de l’acte de penser dans la pensée elle-même. […] Penser, c’est toujours interpréter, c’est-à-dire expliquer, développer, déchiffrer, traduire un signe. […] Il n’y a que des sens impliqués dans des signes ; et si la pensée à le pouvoir d’expliquer le signe, de le développer dans une Idée, c’est parce que l’Idée est déjà dans le signe, à l’état enveloppé et enroulé, dans l’état obscur de ce qui force à penser. » ( Proust et les signes )
jef safi : .. penser comme on digère, entre ce qu’on lit comme on mange, et ce qu’on écrit comme on .. fait ..
Félix Guattari :
« La reproductibilité de la machine n’est pas une pure répétition programmée. Ses scansions de rupture et d’indifférenciation, qui détachent un modèle de tout support, introduisent leur lot de différences tant ontogénétiques que phylogénétiques. C’est lors de ces phases de passage à l’état de diagramme, de machine abstraite désincarnée, que les suppléments d’âme du noyau machinique se voient conférer leurs différences par rapport à de simples agglomérats matériels. […] Tu parles ou tu manges. Pas les deux à la fois. […] Mais l’oralité, justement, est au carrefour. Elle parle la bouche pleine. Elle est pleine de dedans et pleine de dehors. D’un même tenant, elle est complexité en involution chaotique et simplicité en voie de complexification infinie. Danse du chaos et de la complexité. » ( Chaosmose )
jef safi : .. promis .. je ne lirai plus la bouche vide ..
Jacques Derrida (à la manière de ..) :
« Indécidable éructojaculation en restAnce .. promesse non itérable .. tout au plus performative .. impure. »
jef safi : .. je ne suis pas sûr d’avoir bien compris là !
Edgar Morin :
« Comprendre, c’est éliminer l’erreur pour illuminer l’errance. » ( Le paradigme perdu )
jef safi : L’errAnce comme différAnce ? Pourquoi pas .. Illuminons la co~errAnce encore et encore, mais jusqu’où ?
Alain Badiou :
« .. là où ça opère sans sortir de là, là est le lieu où l’étant advient à son identité, à sa consistance relative, .. là où il nomme un nouveau point. Par quoi il apparaît dans ce monde. » ( Logiques des mondes )
jef safi : L’errAnce comme transcendantal ? .. co~errAnce 1N1-récursive, encore et encore, mais pour combien d’encore(s) ?
Etienne Klein :
« Le temps est le meilleur moyen qu’a trouvé la nature pour que tout ne se passe pas d’un seul coup. »
jef Safi : Certes, . . mais je le préfèrerais plus leibnizien, comme . . « le temps est le meilleur moyen qu’a trouvé la nature pour que l’âme ne puisse développer tous ses replis d’un seul coup, car ils vont à l’infini. » . . ou encore, à la fois spinozien et bergsonien, comme . . « la durée, mouvement-événement de toutes les persistAnces, est le meilleur moyen qu’a trouvé la nature pour que tous les êtres ne s’entropient pas d’un seul coup. » . . ou même . . plus intempestif, plus interceptif et parallactique . . conjuguant le verbe Deleuzo-Guattarien . . « le devenir, en tant que dé(re)territorialisation des agencements collectifs d’énonciation, est le meilleur moyen qu’a trouvé la nature pour que toutes les monades, machiniques et désirantes, ne se bouche-anusent pas les unes les autres sur une seule et même ligne de fuite. »